Louvre à succès
Par Lou Trullard
Publié le 4 juin 2022
Comment le Louvre est-il ancré dans la mondialisation ? Pour répondre à cette question, voici les secrets du rayonnement international du « musée des musées », symbole de la richesse culturelle de la France.
Héritier du siècle des Lumières et de la Révolution française, le Louvre s’est vite imposé comme le « musée des musées », une institution qui n’a cessé, depuis, de servir de modèle et de référence tout en étant tournée vers l’avenir avec de nombreux projets et missions à mener.
Un musée universel
Ancien palais des rois, le Louvre évolue aux côtés de l’histoire de France depuis huit siècles. Conçu dès sa création en 1793 comme un musée universel, ses collections, qui figurent parmi les plus belles au monde, couvrent plusieurs millénaires et un territoire qui s’étend de l’Amérique aux frontières de l’Asie. Réparties en huit départements, elles contiennent des œuvres mondialement admirées, comme La Joconde de Léonard de Vinci, la Victoire de Samothrace ou la Vénus de Milo d’Alexandro d’Antioche. Avec 9,6 millions de visiteur·ices en 2019 d’après son propre rapport d’activités, le Louvre est aujourd’hui le musée le plus visité au monde.
Le Louvre entretient des relations avec plus de soixante-quinze pays
Celui-ci attire l’ensemble de la population mondiale. De fait, universel par la richesse de ses collections, le Louvre l’est aussi par la grande diversité de son public. Sur les 10 millions de visiteur·ices environ qui ont été accueilli·es au Louvre en 2018, 69 % étaient d’origine étrangère, dont 15 % en provenance des États-Unis, 8 % de Chine et 6 % du Brésil. Pour s’adapter à la diversité de son public, le Louvre s’attache à se montrer toujours plus accessible : généralisation progressive du bilinguisme voire du trilinguisme sur les cartels des 38 000 œuvres qui sont exposées ; réorganisation de la numérotation des salles ; élaboration d’un nouveau plan guide plus simple d’utilisation ; développement de l’éducation artistique. Par ailleurs, le site internet du Louvre propose de nombreux modules pour préparer sa visite, approfondir ses connaissances et enseigner l’histoire de l’art aux enfants.
Une présence en France et à l’international
Deuxièmement, le Louvre est présent matériellement en France mais aussi dans d’autres parties du monde. Effectivement, le Louvre est un musée au service des territoires français. Ce dernier ne se contente pas d’accueillir des visiteur·ices, mais se porte très souvent au-devant du public, notamment en France. En témoigne l’inauguration, le 4 décembre 2012, du Louvre-Lens, dans la région des Hauts-de-France qui a fortement souffert de la désindustrialisation et des délocalisations industrielles dans les années 1980. À ces difficultés s’est ajoutée la fermeture des dernières mines d’exploitation du charbon au début des années 1990, plongeant ainsi le bassin minier dans un profond désarroi économique avec plus de 200 000 postes supprimés au cours des deux dernières décennies. Le bâtiment, conçu par l’agence d’architecte japonaise Sanaa, récompensée en 2010 par le Prix Pritzker, se compose de deux ailes principales, dont les façades de verre et d’aluminium poli s’insèrent de façon harmonieuse dans un parc paysager conçu par l’architecte-paysagiste française, Catherine Mosbach. Les 205 œuvres qui y sont exposées proviennent des collections du Louvre et sont régulièrement renouvelées. Après La Liberté guidant le peuple d’Eugène Delacroix en 2013, on peut y admirer Œdipe et le Sphinx d’Ingres. Par ailleurs, le Louvre mène une active politique de dépôts et d’expositions, partout en France, en collaboration avec les musées des régions françaises.
La Pyramide de Peï, inaugurée en 1989, a été conçue pour accueillir 4,5 millions de visiteur·ices.Vingt ans après, la fréquentation du musée s’établit à près de 10 millions de visiteur·ices
Mais cela ne s’arrête pas à l’échelle nationale puisque nous retrouvons le Louvre dans le monde. De fait, fidèle à sa vocation universaliste, le Louvre entretient des relations avec plus de soixante-quinze pays. Son action lui permet de renforcer les liens qui l’unissent aux pays dont sont originaires ses collections, de mieux connaître le public étranger et de partir à la rencontre de populations qui ne peuvent pas voyager à Paris. Celle-ci prend plusieurs formes : conseils scientifiques, fouilles, prêts d’œuvres, organisation d’expositions, accueil de délégations officielles.
Mais un projet d’une ampleur exceptionnelle a véritablement permis l’extension de l’influence de la France à l’étranger. Il s’agit du Louvre Abou Dhabi. Le choix du Louvre, en 2007, par les autorités émiriennes pour concevoir le premier musée universel dans cette région du monde, constitue une formidable reconnaissance de son savoir-faire muséographique et de son expertise scientifique. En acceptant de relever ce défi, le Louvre accroit son influence dans une zone en pleine expansion, au carrefour de l’Afrique et de l’Asie. Le bâtiment, conçu par l’architecte français Jean Nouvel, s’étend sur 24 000 m². Il comprend 6 000 m² de galeries pour les collections permanentes et 2 000 m² d’espaces pour accueillir les expositions temporaires. De leur côté, les équipes franco-émiriennes intensifient leurs efforts pour permettre une ouverture du musée en décembre 2015 qui n’aura lieu qu’en novembre 2017. La tâche est immense. Il s’agit de poursuivre la constitution des collections, de planifier les prêts d’œuvres par les collections françaises et de créer une structure de gestion du musée.
Un renouvellement permanent au rythme des évolutions de la société
Le Louvre porte d’importants projets structurants. Depuis le projet « Grand Louvre » qui a permis, en 1989, de doubler ses surfaces d’exposition, le Louvre n’a cessé de construire, de restaurer ou de réaménager ses espaces pour valoriser au mieux ses collections. La période récente a ainsi été marquée par l’ouverture, en septembre 2012, du département des Arts de l’Islam et par la rénovation, en cours, des salles du mobilier du 18e siècle. Le Louvre s’apprête à engager l’un des plus grands chantiers de ces vingt dernières années : le projet « Pyramide ». La Pyramide de Peï, qui a été inaugurée en 1989, a été conçue pour accueillir 4,5 millions de visiteur·ices. Vingt ans après, la fréquentation du musée a plus que doublé pour s’établir à près de 10 millions de visiteur·ices. Le sous-dimensionnement des capacités d’accueil du musée se traduit par de multiples désagréments : constitution de files d’attente, perte de repères, engorgement des vestiaires, nuisances sonores. S’il ne touche pas à l’architecture de Peï, le projet réorganisera l’ensemble des espaces qui se trouvent sous la Pyramide. Il permettra de redonner au Hall Napoléon sa vocation d’accueil, de rencontre et de préparation à la visite, en déplaçant les fonctions logistiques en périphérie. Il proposera en outre, une nouvelle séquence d’accueil, plus simple et plus lisible, des espaces de détente ainsi que de nouveaux outils de médiation culturelle. Aussi, il possède des moyens en constante adaptation. Par exemple, plus de 2 100 personnes, dont 166 personnels de conservation et 1 200 agent·es de surveillance, travaillent quotidiennement au service des collections et de l’accueil du public. S’y ajoutent de nombreux intervenants extérieurs (maintenance technique, surveillance externe, laboratoires, restaurateur·ices, intervenant·es culturel·les…). Par ailleurs, le Louvre a profondément modernisé ses modes de financement et développé ses ressources propres. En 2009, le musée a créé un « fonds de dotation », sur le modèle des « endowment » anglo-saxons, pour financer ses projets de long terme. En 2012, les recettes du musée du Louvre se sont élevées à 216 millions d’euros dont 116 millions de subventions de l’État (54 %) et 100 millions d’euros de ressources propres. Celles-ci se répartissent de la façon suivante : 58 millions d’euros de billetterie, 16 millions d’euros de mécénat et 15 millions d’euros issus de la valorisation du domaine.
Au fil des années, le Louvre est resté et reste fidèle aux missions qui sont les siennes : favoriser la rencontre entre des collections et le public. Plus qu’un lieu de rencontre, il s’affirme désormais comme un lieu de partage, ouvert et généreux, où l’exceptionnel est accessible à tous. On peut donc bien dire que ce musée occupe une place importante dans la mondialisation de part son universalité, son influence et sa présence dans le monde entier ainsi qu’à son évolution au fil du temps et des sociétés.